juste un test voir si ça paraît bien

On ne l'avait toujours pas repéré - ou si on l'avait repéré, on ne l'avait toujours pas pris comme cible ou attaqué. Il avait vu, en trottinant, tous les guérisseurs agglutiner d'un côté, menacés par l'énorme Piquant des Lunar Pods qui s'apprêtait à les tuer. Une stratégie efficace : les clans dépendaient tellement de ceux qui les guérissaient (et qui servaient de facteurs de la Bonne Nouvelle des Étoiles) qu'une telle menace aurait suffi pour forcer les Clans à unir leurs forces et repousser l'envahisseur, non?

Coup de Foudre parcourra son regard sur la bataille. Non. Il ne vit presque personne se sortir les yeux de leur petit couple de bataille ni personne n'oser rentrer les griffes ou prévenir leur adversaire que Hey, il n'y avait pas un peu plus pressant, en ce moment ?

Pauvre guérisseurs, il songea, pressant un peu le pas dans son observation. Ils dédiaient leur vie à distinguer les plantes par leur forme, leurs noms et leurs propriétés et leurs guerriers, ceux qui vouaient leur vie à les protéger, n'étaient même pas assez reconnaissants de leur sacrifice pour venir à leur aide. Il n'en vit qu'une, toute noire sauf son manteau blanc, bariolé de sang, et la rousseur de ses plaques calico se rougissant à la lune du ciel. À elle seule elle avait chassé le gêneur.

Peut-être que Piquant n'était pas une si grande menace que ça, tout compte fait. Et tout compte fait peut-être que personne ne stoppait les hostilités parce-que les Lunar Pods ne le feraient pas. Mais ce n'était pas tout le monde contre les Lunar Pods - c'était tout le monde contre les Lunar Pods ET le Clan du Tonnerre, ces pauvres victimes de la folle ambition d'Étoile de Suie qui, comme une déflagration, avait réussi à consumer tout Cerfblanc de sa vengeance. Mais elle était morte à présent, alors pourquoi rendre les coups? Pour les Étoiles ? Étaient-ce les Étoiles qui avaient ordonné ce que Nuage du Firmament, au campement, avait appelé un "carnage" ?

Et puis il y avait les feulements. On s'envoyait à la tête des bravades et des insultes pour se flatter le dos et le dos de tout son Clan. Pour la Rivière! on disait. Pour l'Ombre ! Mais tous ces individus répandaient le sang et marqueraient à jamais dans l'esprit des plus jeunes les séquelles des griffes de la Guerre. C'était comme si pour eux, il n'y avait pas d'autres façon de survivre. Pour eux, il n'y avait pas d'autres manière de coexister ; seulement le sang.

Enfin les pleurs. Oh, les pleurs. Les pleurs du regret qui accablait chacun de ces êtres qui ne voulaient pas se battre. C'était évident, personne ne voulait se battre ici, mais personne pensait n'avoir d'autre choix. Se battre était inévitable pour eux, alors au lieu de s'arrêter, de respirer, de réfléchir et de voir l'image en grand, ils s'aveuglaient à ne plus regarder que le nez de leur adversaire pour le leur griffer. Et pourtant une chatte pleurait la mort de son adversaire et semblait même prier au salut de son âme - et cette chatte, contre toute attente, faisait partie du Clan du Tonnerre, de son Clan, son Clan terrible responsable de tous les maux.

Coup de Foudre hocha la tête, s'arrêta dans son mouvement et renifla l'air en entrouvrant la bouche. La chatte calico de plus tôt s'était arrachée du sol dans un bond comme un Éclair Tricolore, fondant sur le dos d'une guerrière qu'il reconnut à sa façon de se mouver. Ça ne pouvait être que Vipère Audacieuse - et Vipère Audacieuse et lui étaient associés et s'étaient promis de s'épauler.

Coup de Foudre en oublia ses réflexions une seconde, centralisant son attention sur la sauvagerie qui animait l'éclair tricolore sur le dos de la Vipère, celle-ci honorant son nom en se tordant à terre avec grâce pour éviter les plus gros coups avant de se libérer de la force des dents dans son cou. Les deux chattes se firent face, Coup de Foudre agita sa queue, et bien que l'opportunité s'ouvrit pour sauter dans le dos de la Calico, il attendit.

Il s'assied.

Il les regarda se sauter dessus, lutter dans la terre et se débattre et se mordre et se griffer, emportées par leur rage de vaincre.

Et il pencha sa tête, trop émoussé pour partager comment elles se sentaient. Comment ils se sentaient tous.

« C'est une Assemblée ! » cria l'écho d'une voix étouffée par les sons de la mêlée. Et l'écho retentit, et insista, et supplia. « C'est une Assemblée ! C'est une Assemblée ! »

C'était une Assemblée. Coup de Foudre avait pivoté son oreille vers l'arrière pour écouter la voix, seule voix de la raison noyée dans cette mer de sang. Il n'avait toutefois pas perdu le combat de Vipère des yeux : lorsque s'ajouta cette fois une chatte à la robe fauve rayée mackerel il s'accroupit et dilata ses pupilles. Selon leur entente, il ne pouvait pas laisser Vipère Audacieuse se débrouiller toute seule.

Et s'il devait faire comme tout le monde, lui aussi se laisserait succomber par ses pulsions. Inutile de les insulter, inutile de s'évertuer ou de perdre son souffle à tenter de justifier son acte.

Il savait très bien que toute cette guerre était, selon leur standard, immorale.

Il se lécha la patte, sortit les griffes, s'arracha de son masque et inspira son air pour gonfler ses poumons. Il calibra son corps d'un tout petit frétillement de la croupe, et comme l'Éclair Tricolore, il passa à l'attaque.

Une ombre s'abattit de plein fouet dans le dos de la meneuse du Vent - un premier temps pour lui couper le souffle. Deuxième temps, ses crocs se plongèrent dans la nuque tigrée, il les serra, tordit sa tête pour en faire de même sa peau sous ses poils et après lui avoir saisi ses épaules suantes entre les griffes, il l'envoya au tapis avec lui.

HRP: